Pionnier de l’agroécologie, Pierre Rabhi questionne le système économique et les valeurs humaines. À la fois paysan et penseur, il plaide non seulement pour réconcilier l’être humain avec la nature et avec lui-même, mais aussi pour l’altruisme, la solidarité et la bienveillance. Nous avons interviewé Pierre Rabhi à l’occasion de la sortie de son livre « J’aimerais tant me tromper… ». Celui-ci se présente comme un recueil d’échanges entre le journaliste Denis Lafay et Pierre Rabhi autour de l’agroécologie, des crises actuelles, de la bienveillance et du devenir du monde.
« J’aimerais tant me tromper… », pourquoi avoir choisi ce titre ?
J’aimerais me tromper car mes prédictions m’amènent à dire que le monde d’aujourd’hui va mal. Or, quand on est militant, on a envie de participer à l’évolution du monde, de l’histoire et de la société. En ce sens, la formule de Pierre Fournier me paraît très intéressante et appropriée, ce journaliste et militant écologiste disait « nous ne savons pas où nous allons, mais nous y allons ».
Qu’est-ce qui vous donne de l’espoir ?
Ce sont toutes les personnes au sein de la société civile qui créent et agissent intelligemment pour anticiper et devancer l’effondrement du système. Elles sont jugées comme des marginaux par certains, alors qu’elles sont pourtant capables de changer la donne.
Pensez-vous que notre monde moderne nous coupe des rythmes naturels ?
Absolument, le lever et le coucher du soleil ou encore les quatre saisons composent les rythmes naturels. Tout ce qui se passe dans l’univers est rythmé par la nature elle-même. Et pourtant, nous avons modifié le rapport entre le temps et l’espace.
Un rythme de vie en accord avec la nature
Comment l’avons-nous modifié ?
Il y a peu, le rapport entre le temps et l’espace n’était pas le même qu’aujourd’hui. Dès l’origine de l’humanité, les hommes se déplaçaient avec leurs jambes, avec des chevaux, ou avec les voiles de leurs bateaux, mais jamais avec des moteurs à explosion. La motorisation des transports a fondamentalement transformé notre perception du temps et de l’espace. Elle a engendré une accélération sans précédent du temps. On le voit bien aujourd’hui, même dans un avion qui va à je ne sais combien de kilomètres à l’heure on regarde sa montre par peur d’être en retard. […]